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Freyja est-elle la déesse Ôstara ?

Freyja est une déesse scandinave qui est bien attestée dans de nombreux mythes. Elle y est présentée comme une déesse bien distincte de la déesse Frigg, bien que certaines théories en fassent deux aspects d’une même déesse. En fait, le seul argument pour les confondre est que Frigg est l’épouse de Óðinn alors que Freyja est la compagne d’un dieu mystérieusement nommé Óðr, et qu’il s’agit probablement du même dieu. Mais Óðinn ne manque pas d’autres compagnes pour enfanter ses nombreux enfants (Jörð, Gríðr, Rinðr), et il faudrait alors supposer qu’elles sont sont toutes des aspects de Frigg… autant dire que cela nous réduirait très considérablement le nombre de déesses dans le panthéon, ce qui n’est guère cohérent qu’avec l’hypothèse de « La Grande Déesse du Nord », défendue par Régis Boyer et Hilda Ellis Davidson. De toute façon, dans cette hypothèse-là, puisque toutes les déesses ne sont que des aspects de La Déesse (Boyer et la Wicca, même combat !), alors n’importe quelle déesse est n’importe quelle autre déesse, et la question est vite pliée.

Pour revenir à notre affaire, le problème avec Freyja est qu’elle semble n’avoir été connue qu’en Scandinavie, alors que son frère, Yngvi-Freyr, est attesté en Angleterre et en Allemagne. De plus, son nom, Freyja, signifie simplement « dame », alors que son frère a un autre nom, Yngvi, en plus de son titre de freyr (« seigneur »). Quel est alors le « vrai nom » de Freyja, et pourquoi n’y a t-il pas de traces d’elle chez les Germains continentaux ? Ces questions ont poussé plusieurs chercheurs à favoriser la théorie selon laquelle Freyja = Frigg, ou alors qu’elle aurait été soit une innovation spécifiquement scandinave, soit que son culte aurait disparu chez les Germains continentaux sans laisser de trace, ce qui semble étrange pour une déesse si importante alors que la plupart des autres divinités majeures (Odin, Thor, Balder, Tyr, Freyr, Frigg, Sól, et même Fulla) sont également attestée chez les Germains continentaux.

Il se trouve qu’il y a également une déesse germanique continentale qui n’a pas d’équivalent connu en Scandinavie : Ēastre, sous son nom en vieil-anglais, et Ôstara en vieil haut-allemand si on se base sur le nom du mois qui semble porter son nom, Ôstarmânôth (qui correspond plus ou moins au mois d’avril). Cette déesse a été suspectée d’avoir été inventée par le moine Bède le Vénérable pour expliquer le nom du mois de Ēosturmōnaþ. Cependant, il se trouve que ce nom dérive d’une manière linguistiquement parfaite, en vieil-anglais et en vieil haut-allemand, de la racine primitive *H₂éwsos qui signifie « aube, aurore ». Or, la plupart des religions indo-européennes, qui dérivent d’une origine commune remontant au début de l’âge du bronze (soit près de 4000 ans avant Bède le Vénérable), ont justement une déesse de l’aurore dont le nom dérive directement de cette racine : Aurora chez les Romains, Êôs chez les Grecs, Aušrinė en Lituanie, Ushas en Inde. Il serait bien surprenant qu’une invention (pour quelle raison ?) d’un moine du 7e siècle de l’ère chrétienne, qui ignorait tout de la linguistique indo-européenne et de ces profonds liens mythologiques, soit par hasard tombé aussi juste.

Si on regarde les mythes autour de cette déesse de l’aurore (aucun mythe concernant ĒastreÔstara ne nous est parvenu, à part éventuellement des contes collectés à la fin du 20e siècle chez des Allemands de Pennsylvanie, ce qui est extrêmement tardif), plusieurs points communs ressortent. C’est une déesse d’une grande beauté, qui a des relations amoureuses avec des dieux ou même des mortels, comme Freyja (et contrairement à Frigg). En Inde, elle est également liée à deux jumeaux guérisseurs maîtres des chevaux, les Ashvins, qui doivent se battre ou ruser pour être intégrés parmi les dieux. Les équivalents des Ashvins en Grèce sont les Dioscures, Castor et Pollux : maîtres des chevaux et guérisseurs, ils doivent négocier avec Zeus le statut de demi-dieux. Ils sont également les frères de Hélène de Sparte, plus belle femme du monde, qui tombe amoureuse de Pâris alors qu’elle est déjà mariée, et dont l’enlèvement déclenche la plus grande guerre humaine, la guerre de Troie – un thème mythique qui semble proche de celui des aventures amoureuses de la déesse de l’aurore. Avons-nous un équivalent de ces jumeaux dans le monde germano-scandinave ?

Il se trouve que Freyr et Freyja sont jumeaux, et qu’ils ont été inclus dans la société les dieux célestes, les Ases, suite à une guerre contre eux. Leur peuple, les Vanes, maîtrise tout ce qui relève de la prospérité et de l’amour (ce qui est considéré comme la 3e des 3 fonctions sociales indo-européennes), alors que les Ases maîtrisent tout ce qui se rapport à la guerre et à l’autorité (2e et 1ère fonctions). Or, la fameuse guerre de Troie est déclenchée parce que Pâris, pour avoir l’amour d’Hélène, a préféré Aphrodite, déesse de l’amour (3e fonction), par rapport à Athêna qui lui proposait la victoire au combat (2e fonction) et Hêra qui lui proposait de régner sur le monde (1ère fonction) : par conséquent, Hêra et Athêna se placent du côté des Grecs contre Aphrodite qui défend Troie, tout comme la guerre des Ases et des Vanes oppose les 2 premières fonctions à la 3e.

Tout cela est bien joli, mais Freyr et Freyja ont beau être jumeaux, ce sont des jumeaux masculins qu’il nous faut pour que la comparaison avec les Ashvins et les Dioscures fonctionne. Heureusement, Georges Dumézil, référence dans le milieu des études indo-européennes, a relevé dans ses Esquisses de Mythologie que dans certains exemples, dans le Caucase et en Iran notamment, se trouvaient des cas où on reconnaissait les caractéristiques distinctives de ces deux jumeaux mâles, mais cette fois dans un duo père-fils ou même oncle-neveu. Or, il identifie en Scandinavie un duo père-fils qui remplit bien ces critères : Freyr et Njörðr, son père (invoqués conjointement dans le serment légal islandais, « Njörðr ok Freyr », et dans la Arinbjarnarkviða, 17 : « Freyr ok Njörðr »). Ainsi, avec « Njörðr + les jumeaux Freyr & Freyja », nous avons un parfait analogue du trio indien « Ushas + les jumeaux Ashvins » et du trio grec « Êôs/Hélène + les jumeaux Dioscures, Castor et Pollux ». Freyja est ainsi liée à un duo qui doit obtenir sa place parmi les dieux suite à un conflit qui oppose la 3e fonction aux deux premières fonctions. Comme les déesses de l’aurore, elle est décrite comme très belle et sujette aux affaires amoureuses, y compris avec le mortel Óttar.

Tous ces éléments permettent de proposer une solution à l’absence de Freyja chez les Germains continentaux, comme à l’absence de déesse de l’aurore chez les Scandinaves : ĒastreÔstara (« Aurore ») et Freyja (« la Dame ») pourraient être deux évolutions séparées d’une ancienne déesse germano-scandinave de l’aube, du printemps, et de l’amour, *Frawjǭ *Austrǭ, « la Dame de l’Aurore ».

Bien que cela ne puisse pas être directement prouvé, cette solution apporterait une lumière nouvelle à certains mythes concernant Freyja. Par exemple, lorsque le Géant qui construit les murs de Asgarðr, la forteresse des dieux, exige d’avoir comme salaire « Freyja, le soleil, et la lune » : si Freyja est une ancienne déesse de l’aube, il réclame alors « l’aurore, le soleil et la lune », trois phénomènes astronomiques lumineux. Quand elle pleure « des larmes d’or rouge » suite à la disparition de son compagnon, er hon fór með ókunnum þjóðum at leita Óðs (Gylfaginning, 35 : « quand elle était partie parmi des peuples inconnus pour chercher Óðr » – on attend bien d’une déesse de l’aube qu’elle parcoure le territoire de tous les peuples), ces « larmes d’or rouge » évoquent plutôt bien les couleurs de l’aurore. De même, son superbe collier d’or, Brinsingamen, peut évoquer la « robe de safran » de Êôs, la déesse grecque de l’aube, et les teintes de l’horizon au petit matin. Dans la Sörla þáttr, même si c’est un récit tardif, elle l’obtient en passant une nuit avec chacun des quatre Nains qui le lui fabrique : il est également possible, même s’ils portent ici d’autres noms, qu’ils soient un reflet des quatre Nains qui portent les quatre coins du monde : Suðri, Vestri, Norðri, et Austri (« Sud », « Ouest », « Nord » et « Est »). Ainsi, la déesse de l’aurore aurait besoin d’être successivement au au sud, à l’ouest, au nord, et à l’est, pour obtenir son magnifique « collier d’or », c’est-à-dire les couleurs du soleil levant.

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Fêtes et rites de passage dans la tradition germano-scandinave

Certains moments de la journée (aube, midi, crépuscule, minuit) sont particulièrement sacrés. De la même manière, certaines journées sont plus sacrées que d’autres. Dans notre tradition, elles correspondent aux jours de fête, répartis le long de l’année et célébrant l’été qui revient après l’hiver, d’autre part aux rites de passage, qui marquent les grands moments de notre vie et qui célèbrent le fait que les générations se succèdent, chacun devenant tour à tour héritier puis Ancêtre.

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La prophétie de Pádraig Mac Piarais

Et maintenant je parle, empli par mes visions,
Je parle à mon peuple, et je parle au nom de mon peuple aux
Maîtres de mon peuples :
Je dis à mon peuple qu’il est béni,
Qu’il est auguste malgré ses chaînes.
Qu’il est plus grand que ceux qui le tiennent
Et plus fort et plus pur,
Qu’il a cependant besoin de courage, et d’appeler le nom de son dieu,
Dieu qui ne pardonne pas, ce cher dieu qui aime le peuple
Pour lequel il est mort nu, endurant la honte.
Et je dis aux maîtres de mon peuple : attention,
Attention à ce qui vient, attention au peuple debout,
Qui saura prendre ce que vous ne donneriez pas.
Pensiez-vous qu’on peut conquérir le peuple, ou que la loi est plus forte que la vie,
Et que le désir des hommes d’être libres ?
Nous verrons cela avec vous, vous qui avez saccagé et oppressé,
Vous qui avez persécuté et corrompu.
Tyrans… hypocrites… menteurs !

– The Rebel (Patrick Pearse, 1879-1916)

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Parick Pearse, de père anglais et de mère irlandaise, est né et mort dans la ville de Dublin. Entre temps, poussé par ses livres qui lui parlaient des héros du passé, tels que Cúchulainn à la gloire immortelle, il était allé apprendre le gaélique chez sa grande-tante du comté de Meath. Convaincu que l’âme irlandaise pouvait et devait renaître, il s’engage dans l’éducation, fondant une école où la jeunesse apprend sa langue, son Histoire, et les hauts faits de ses Ancêtres, païens comme chrétiens. Profondément mystique, il considère les traditions et la liberté de son peuple comme un héritage spirituel d’une valeur absolue. Quant son école menace de faire faillite car les frais d’inscriptions sont trop bas, il refuse de les relever au-dessus des moyens de peuple et part aux Etats-Unis rencontrer des Irlandais émigrés ayant accumulé des fonds. Les flammes dans ses yeux et le scintillement de ses mots les convainquent de faire des dons suffisants pour remettre les comptes à flots et le projet continue. Il sera entres autres l’inspirateur des écoles Diwan et Dihun, qui participent encore aujourd’hui à la transmission de la langue bretonne.

La grande guerre civile européenne de 1914 sert de prétexte à la suspension d’un projet de loi d’autonomie, voté par les réformistes. Des milices favorables à la domination anglaise se forment, surtout en Irlande du Nord (centre de peuplement des colons britanniques). Pearse rejoint l’Irish Republican Brotherhood, une société secrète ayant pour but d’organiser un soulèvement général. Ils font jonction avec l’Irish Citizen Army, groupe d’autodéfense des syndicalistes irlandais refusant d’aller mourir contre les prolétaires allemands. Ensemble, ils préparent une révolution socialiste à l’échelle nationale en faveur d’une Irlande « pas seulement libre mais gaélique aussi, pas seulement gaélique mais libre aussi ». C’est la naissance de l’Irish Republican Army (IRA).

Foggy dew

En 1916, un accord est négocié avec l’Empire Allemand pour obtenir des armes. Le soulèvement général est prévu pour le lundi de Pâques. Malheureusement, la cargaison est intercepté par la marine anglaise ; mais Pearse maintient le cap coûte que coûte. Il sera le président d’une éphémère république de six jours, assiégée dans Dublin par l’armée anglaise. Au dernier moment, pour éviter le massacre général, il donne l’ordre de capituler. Seize meneurs sont condamnés à mort, dont lui-même. Fusillé à l’âge de 36 ans, il écrit de touchants adieux à sa mère, lui demandant de garder le souvenir de son courage et de rester fière de ses actes. Un an plus tôt, sur la tombe d’un camarade, il avait dit : « Nos ennemis sont forts, sages, et rusés ; mais, aussi forts, sages et rusés qu’ils soient, ils ne peuvent empêcher le divin miracle qui fait germer, dans les coeurs des jeunes gens, les graines semées par les jeunes gens d’une génération précédente ». Dès 1919, son sacrifice permettra d’éveiller les Irlandais, qui se lancent dans une guérilla active menée par l’IRA. En deux ans, ils décrochent un traité permettant d’établir un Etat irlandais effectif. La République d’Irlande naît en 1922, seulement six années après cette république de six jours, qualifiée de folie par les hommes de son temps. La chanson The Foggy Dew fut composée en son honneur.

Gloire à toi, Pádraig mac Piarais, pour ta folie bénie, toi qui goûtes à présent les pommes d’or du Tír na nÓg, terre de l’éternelle jeunesse, aux côtés de Cúchulainn et de tous les héros et dieux des Celtes.

Yec’hed mat, Padrig, e Tir ar re Yaouank !

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Rite des étudiants à Minerve Pallas

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Dans le calendrier religieux de la Rome antique, le 19 mars marquait le début du festival des Quinquatries Majeures (un jour à l’origine, étendu à cinq jours ensuite). C’était la naissance de Minerve, déesse de la sagesse, des techniques, et de la stratégie. Elle était honorée en ce jour par les étudiants, les professeurs, et les médecins.

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Aujourd’hui, elle patronne encore l’Institut de France, qui n’est rien moins que l’entité regroupant l’Académie Française, l’Académie des Sciences, l’Académie des Beaux-Arts, l’Académie des inscriptions et Belles-Lettres (Histoire et archéologie), et l’Académie des sciences morales et politiques.

En tant qu’étudiant français, dans un système éducatif issu des écoles et universités romaines, il semble logique de rendre cet hommage à Minerve Pallas (son aspect de jeune fille). Ne pratiquant jusqu’ici pas les rites gallo-romains, ceci est une proposition et un premier essai, qui semble selon mes vérifications ornithomantiques avoir été accepté comme valide (avec deux bâtonnets d’encens et une double offrande de vin en expiation supplémentaire). Le Mercure Gaulois, divinité favorite des Gallo-romains, messager des Dieux, interprète (et selon mon interprétation patron de la langue française) est honoré dans la préface, mais il s’agit-là d’un choix personnel. Si votre foyer suit le rite romain de manière courante, Vesta et/ou Janus font d’excellents choix.

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Préparation :
* L’officiant prend une douche (si possible un bain) pour se purifier juste avant le rituel. Il met les habits reflétant le mieux son statut social. Si le rite se passe hors du foyer, se laver les mains avec un peu d’eau, puis s’en asperger le front de quelques gouttelettes avec les doigts. Dans tous les cas, un récipient d’eau doit être à disposition de l’officiant pour la suite du rite.
* Les participants arrivent ensuite au lieu du rituel, ou, s’il a lieu dans un foyer, placent l’idole de Minerve sur l’autel. Cette idole peut être un olivier ou des branches d’olivier, une statuette, un dessin, etc.
* L’officiant allume ou fait allumer un feu, ou une bougie sur l’autel.

Préface :
* L’officiant couvre sa tête (capuche, chapeau, écharpe, pan de toge, etc). Chacun est tourné vers l’autel, derrière l’officiant, hommes tête nue, femmes tête couverte.
* L’officiant allume ensuite un bâton d’encens, ou ajoute de l’encens dans l’encensoir, disant : « MERCURE GAULOIS, EN T’OFFRANT CET ENCENS JE TE PRIE AVEC DE BONNES PRIÈRES, POUR QUE TU VEUILLES ÊTRE PROPICE À CE RITE ». Il est possible de réciter un des hymnes homériques à Hèrmès.
* Il verse du vin dans la patère : « MERCURE GAULOIS, COMME EN T’OFFRANT CET ENCENS DE BONNE PRIÈRES FURENT BIEN PRIÉES, POUR LA MÊME RAISON SOIS HONORÉ PAR CETTE LIBATION DE VIN ».
* L’officiant verse ensuite le contenu de la patère sur le feu, ou dans la terre, si c’est possible. Si elle est petite, il peut transférer son contenu dans un autre récipient pour pouvoir poursuivre le rite, et rendre le tout à la terre après le rite. On peut honorer d’autres entités pour la préface (Vesta, Janus, Lares, etc)

Précation :
* L’officiant se purifie à nouveau les mains. Il touche ensuite l’autel, ou tend la main vers l’idole s’il n’y a pas d’autel, disant : « MINERVE PALLAS, PARCE QU’IL EST OPPORTUN POUR LES ÉTUDIANTS DE T’OFFRIR DU VIN ET DES BISCUITS EN CETTE FÊTE SACRÉE DU PREMIER JOUR DES QUINQUATRIES MAJEURES, AFIN QUE LEURS ÉTUDES LEUR APPORTENT LA SAGESSE, POUR CETTE RAISON SOIS HONORÉE PAR CES OFFRANDES ».

Reddition :
* L’officiant verse du vin dans la patère, disant : « MINERVE PALLAS, SOIS HONORÉE PAR CETTE OFFRANDE, SOIS HONORÉE PAR CETTE LIBATION DE VIN ».
* L’officiant dépose ensuite sur l’autel les biscuits, disant : « MINERVE PALLAS, SOIS HONORÉE PAR CETTE OFFRANDE, SOIS HONORÉE PAR CETTE OBLATION DE BISCUITS ».
* Il est aussi possible de faire des offrandes à d’autres entités.
* Les offrandes qui sont destinées à être consumées, enfouies ou mises ce côté pour être déposées plus tard, le sont à ce moment-là.

Profanation :
* L’officiant touche de la main les offrandes restantes, pour que les humains puissent les manger.

Expiation :
* L’officiant allume un bâton d’encens, et dit, levant les mains vers le ciel : « DIEUX IMMORTELS, SI VOUS AVEZ ÉTÉ OFFENSÉS PAR DES ERREURS COMMISES DURANT CE RITE, RECEVEZ CET ENCENS EN EXPIATION DES ERREURS DES HUMAINS MORTELS ». On peut aussi offrir du vin ou des biscuits, par précaution.

Divination :
* L’officiant ou un augure s’assurent que le rite et l’expiation ont été suffisants. Cela peut se faire par diverses méthodes : soit par l’observation (changement météorologique type vent, pluie ou arc-en-ciel ; animaux, etc), soit par le hasard (dés, pile-ou-face, cartomancie, etc). Si besoin, nouvelle expiation.

Banquet :
* Les participants consomment les offrandes restantes, se portant mutuellement des toasts. L’officiant peut enlever son couvre-chef. Il est possible de porter des toasts à d’autres entités.

Selon la coutume, les étudiants offrent également un cadeau à leurs enseignants. J’ai aussi honoré le fondateur de mon école et le génie tutélaire de ma promotion.

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Merci à un mien ami pour les illustrations (que Minerve lui soit propice et lui accorde la sagesse pour parvenir à la victoire) ; et aux membres de l’association Pharia, consacrée aux spiritualités méditerrannéennes antiques, pour leurs lumières. Si votre héritage gallo-romain vous intéresse, le 18 juin aura lieu le premier pélerinage groupé à Mercure Dumiatis en son temple du Puy-de-Dôme.

[Ajout du 22/09/2020 : l’officiant est capite velato, c’est-à-dire tête couverte, qu’il s’agisse d’un homme ou d’une femme. La preuve en est Eumachia, fille de Lucius Eumachius, prêtresse publique du culte impérial à Pompéi : la statue qui la présente explicitement dans ce rôle a la tête couverte.]

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Résurgence du zoroastrisme au Kurdistan irakien

Source : http://geopolis.francetvinfo.fr/daech-fait-renaitre-le-zoroastrisme-de-ses-cendres-au-kurdistan-irakien-64971

zoroastriens-iraniens-au-festival-annuel-sadeh_0Face à la pression du fanatisme de leurs voisins arabes, des Kurdes irakiens ont célébré le 1er mai dernier, autour d’un grand feu sacré, un rite de ré-adoption des coutumes zoroastriennes après plusieurs siècles d’islamisation forcée. Mise à part la minorité yézidie, qui en pratique une version spécifique, cette religion avait disparu du Kurdistan, et ne persistait que faiblement en Iran (30.000 adeptes) et en ailleurs en exil (170.000 adeptes, la plupart en Inde dans la communauté pârsi). Le gouvernement autonome du Kurdistan irakien a reconnu cette nouvelle communauté religieuse et travaille à ce que leur juste place dans la société soit garantie, et ce d’autant plus qu’elle signifie un retour aux sources de la culture kurde.

Le zoroastrisme est une religion monothéiste non-abrahamique, c’est-à-dire qu’elle n’est pas issue du judaïsme. Il s’agit d’une réforme, par le prophète Zarathustra, de la religion traditionnelle des Perses, peuple indo-iranien. Malgré ces changements importants dans la religion, les rites gardent la trace de l’antique paganisme indo-européen, par exemple dans le précepte « Humata, Hukhta, Huvarshta » (bonne pensée, bonne parole, bonne action) ou dans la persistance de divinités en tant qu’émanations ou serviteurs du dieu suprême, Ahura Mazda.

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Le Blaireau, le Porc-épic et le Renard : ouste !

Les anciens calendriers du nord de l’Europe font commencer la saison claire début mai. Dans la tradition rhénane, en particulier telle qu’elle a été conservée en Pennsylvanie, les Géants du givre tentent, pendant la première demi-lune qui suit le premier jour de mai, de renverser l’ordre cosmique et de prendre le contrôle de la partie claire de l’année. C’est vraisemblablement en lien avec les textes scandinaves qui parlent du Fimbulvetr, le Terrible-Hiver, qui durera trois ans consécutifs et annoncera la fin de notre ère dans un chaos fratricide où les traditions seront profanées.

Butzemann des hauts de Saverne

Le treizième jour de mai, c’est le Blaireau du Treize (Drizehdàcks en alsacien, Drizehdax en franconien) qui surgit des zones sauvages situées hors du Mettelgàrt, le domaine des Humains. Dünner, le plus fort des Dieux, fait usage de sa massue-tonnerre pour lui infliger la correction qu’il mérite. Après qu’il se soit carapaté pour lécher ses plaies, le lendemain arrive Vatzehvedder, le Porc-épic du Quatorze. Cette fois, Dünner monte la garde et apprend au Butzemann, l’Esprit protecteur de chaque territoire habité des Humains, à le repousser, puisqu’il est moins virulent que le Blaireau du Treize si on sait comment s’y prendre. Alors que Porc-épic Quatorze rumine son humiliation, arrive dans les vingt-quatre heures suivantes le Fufzehfucks (Fuffzehfux en franconien), le dernier Géant du givre. Celui-ci est particulièrement rusé et prend la forme d’un goupil, le Renard Quinze, qui s’approche lentement de l’enclos des Humains et le franchit subrepticement. Heureusement, le Butzemann veille au grain et repousse courageusement ce vil couard qui glapit en s’enfuyant. Si nécessaire, par exemple si les forces de l’hiver sont plus coriaces qu’à l’accoutumée ou le Butzemann local un peu naïf, Dünner lui donne un coup de main.

Fosse à offrandes Saverne 16 mai 2015C’est d’ailleurs ce qui s’est passé cette année en Alsace, puisque nous avons eu droit à un bel orage. Le 16 mai, profitant d’une promenade dans les Vosges, nous avons donc procédé à une cérémonie d’offrande à Wogesen (Vosegus en latin), le maître des Esprits du massif qui domine la plaine jusqu’au Rhin. Après une belle marche, nous sommes arrivés à un endroit particulièrement propice possédant un petit autel moussu, un immense frêne en guise d’Arbre-Monde qui était entouré de branches de chêne pour bénir l’endroit, des roches propices à l’accueil des Esprits, et également une fosse à offrandes. Les fumigations et invocations d’usage furent suivis de libation de bière en l’honneur des Ancêtres d’un participant, de Guldzàhn qui veille sur l’arc-en-ciel dans son château au sommet du Himmelsbarg (la montagne céleste), de Dünner notre ami protecteur et de son père Wüati (Odin), et bien évidemment de Wogesen et des siens.

Cette année encore, l’été et nos fidèles alliés ont vaincu les Géants du givre, porteurs du chaos et ennemis de la vie. Alors que la lueur des bougies dédiées à nos Ancêtres et nos Descendants ont vacillé avec le vent qui soufflait en haut des Vosges, celle en l’honneur de nos vivants Amis a fièrement tenu tête aux éléments. Aussi longtemps que nous vivrons, entretenant notre mémoire et la transmettant à ceux qui nous suivent, perdureront nos coutumes : respect de la parole donnée, hospitalité et harmonie de nos communautés, honneurs rendus à nos terres sacrées au fil des saisons.

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Bénédiction matinale dans la tradition germano-scandinave

Note : ceci est un extrait d’un fascicule en cours de rédaction sur une manière de pratiquer au quotidien la tradition germano-scandinave. L’impératif est utilisé par soucis de concision.

Benediction matinale

IL EST NATUREL DE SALUER LE SOLEIL AU MATIN. Dans notre tradition, c’est la déesse Sunna qui conduit le char solaire. Celui-ci, comme la lune, est poursuivi par un loup géant qui l’attrapera au Ragnarök. Chaque jour qui nous en sépare est béni par un court hymne, afin qu’il soit utilisé pour nous préparer au mieux.

« The Wolves Pursuing Sol and Mani » par John Charles Dollman (1909)

CETTE PRIÈRE PROVIENT DU SIGRDRIFUMAL, UN CHANT TIRÉ DE L’EDDA POÉTIQUE. La valkyrie Brunehilde a été endormie par la piqûre d’une épine magique. Après avoir vaincu le dragon Fafnir, le héros Siegfried la délivre de son sommeil. Lorsqu’elle se réveille, elle lui chante ces deux strophes en lui tendant une corne à boire pleine d’hydromel, la boisson de l’inspiration :

SALUT AU JOUR !

SALUT AUX FILS DU JOUR !

SALUT À LA NUIT ET SES FILLES.

REGARDEZ-NOUS AVEC DES YEUX BIENVEILLANTS, ET ACCORDEZ-NOUS LA VICTOIRE !

SALUT AUX dieux !

SALUT AUX déesses !

SALUT À LA TERRE GÉNÉREUSE.

DONNEZ-NOUS LE BON SENS, L’ÉLOQUENCE ET DES MAINS HABILES À FAIRE LE BIEN !

DÉBUTER AINSI SA JOURNÉE, C’EST S’INSCRIRE DANS NOTRE TRADITION POUR BÉNÉFICIER D’UNE SAGESSE ANTIQUE QUI EST TOUJOURS D’ACTUALITÉ. En effet, la suite du poème contient de précieux conseils révélés à Siegfried. Ils ne sont pas des dogmes, mais des condensés de millénaires d’expérience, issus de temps où la stupidité était synonyme de mort rapide. Alors que nous sommes bombardés de messages publicitaires, c’est un moyen de nous reconnecter à la nature, et à notre propre nature humaine.

NOUS CONSERVONS ENTIÈREMENT NOTRE LIBRE-ARBITRE, NOTRE « VOLONTÉ DE PUISSANCE ». C’est à nous de faire les choix nécessaires pour se forger un destin héroïque. En quelques vers, ce poème nous rappelle que, même sous le regard bienveillant des astres, le succès dépend de nos propres capacités : bon sens, éloquence, habilité. Un journée vécue dans notre tradition consiste donc à les entretenir, à les développer, et à accompagner les siens dans cette voie.

Tiré de « Jour après Nuit – vivre au quotidien dans la tradition germano-scandinave », un fascicule du clan Ostara à paraître cette année. Vous pouvez retrouver ici le fascicule sur Les Douze Nuits de Yule concernant les festivités du solstice d’hiver.

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« Maypole song from Summerisle », un chant pour l’Arbre de Mai

Dans les bois j’ai vu un arbre
C’était un très bel arbre :

{Ce bel arbre avait un tronc
Et sur ce tronc, y’avait une branche,
Sur cette branche, y’avait un nid,
Et dans ce nid, y’avait un oeuf,
Dans cet oeuf, un oisilon,
Qui perdit une petite plume
De la plume, on fit un lit…

Sur ce lit, y’avait une fille,
Sur cette fille, y’avait un gars,
De ce gars, une semence,
De la semence, un p’tit garçon,
Le garçon devint un homme,
Pour cet homme, on fit une tombe,

Par-dessus la tombe, un arbre…

C’est l’été ! c’est l’été ! c’est l’été ! c’est l’été ! c’est l’été !

(bis repetita)}

L’Arbre de Mai (film : The Wicker Man)

Et, quand même,les paroles originales :

In the woods there grew a tree
A fine, fine tree was he

On that tree there was a limb
And on that limb there was a branch
On that branch there was a nest
And in that nest there was an egg
In that egg there was a bird
And from that bird a feather came
Of that feather was a bed

On that bed there was a girl
And on that girl there was a man
From that man there was a seed
And from that seed there was a boy
From that boy there was a man
And for that man there was a grave
From that grave there grew a tree

In Sumerisle, Sumerisle, Sumerisle, Sumerisle, Sumerisle

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Les fêtes de mai : Belotennia, Hexenacht, Floraliae, …

Le mois de mai approche de la Gaule, et avec lui son cortège de festivités. La préparation de celles-ci, ainsi que la nature qui revit, se liguent pour tenir les coussinets du Chat Poron loin de son clavier. Ceci étant, ne serait-ce que par sens du devoir, pas question de ne pas donner ne serait-ce qu’une petite vue d’ensemble de ce qui se trame par chez nous.

Petit selfie printanier

Petit autoportrait à la mode moderne (dit « selfie » en anglois)

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Le Retour de la Jacinthe des Bois

Présenter des photos dans la section « arts » d’un blog consacré aux arts traditionnels peut sembler contradictoire. Pour autant, comme disait Jean Jaurès (d’ailleurs inhumé dans le Panthéon républicain), « la tradition, ce n’est pas conserver la cendre, c’est entretenir la flamme ». Les Amérindiens ont d’ailleurs eu ce type de débat… quand il se sont retrouvés face à des acheteurs étrangers à la recherche d’oeuvres « d’art traditionnel », sur lesquelles ils pourraient spéculer vue la demande croissante de la nouvelle bourgeoisie occidentale.

Pour eux, pas de débat à avoir. On peut tout naturellement exprimer une vision du monde traditionnelle par des moyens nouveaux : c’est d’ailleurs bien ce qui s’est produit avec l’avènement et le développement de la métallurgie. La « vision du monde » traditionnelle est ici assez explicite : nul besoin d’aller faire exploser son bilan carbone dans des destinations exotiques pour contempler les beautés de notre très généreuse Terre.

Toutes les images présentées ici proviennent du sud de l’Angleterre, d’Île-de-France, de Picardie, ou de Belgique. A part celles du bois de Hal en Belgique, qui est un lieu assez exceptionnel mais pas unique pour autant, si j’ai dû aller piocher aussi loin (encore que ces distances restent très raisonnables), c’est entres autres parce que les réseaux sociaux sont remplis de photos de voyages exotiques plutôt que d’aller chercher la beauté qui est sous nos yeux.

Comme abordé en commentaires sur un autre article, insister sur la splendeur de « nos » contrées ne constitue pas une fermeture à la superbe diversité des paysages de notre monde. Ce n’est pas non plus en revendiquer agressivement une propriété exclusive, et encore moins d’y sous-entendre une domination qui justifierait de l’exploiter selon notre bon plaisir. Ce qui définit qu’un endroit est « nôtre », c’est la profondeur de leur responsabilité que nous avons à son égard. La Jacinthe des Bois est ce qu’on appelle un bio-indicateur, c’est-à-dire qu’elle matérialise des parcelles forestières qui n’ont pas été exploitées de manière intensive depuis un certain temps. En cette lune d’Ostara, elle commence à revenir dans ses sous-bois. Puisse t-elle revenir fleurir toute l’Europe atlantique de ses clochettes violacées comme l’aube éternelle !

Jacinthe des bois

Quand bien même nous ne sommes pas propriétaires forestiers, les surfaces boisées publiques représentent en France 4 millions d’hectares. Beaucoup sont encore gérées d’une manière qui n’est pas favorable à la biodiversité, alors que, depuis les années 50, des méthodes de sylviculture ont été développées qui permettent de gérer les forêts de manière durable en favorisant le foisonnement de la vie. Le réseau ProSilva a même pu montrer, après des études de long terme, que la sylviculture irrégulière permet d’obtenir des résultats économiques similaires aux méthodes en coupe rase encore considérées aujourd’hui comme « plus rentables ».

N’oubliez pas non plus la quantité de papier et d’emballages cartonnés jetés chaque jour. La société de consommation, fondation du mode de vie occidental prétendument « moderne », nous dirige droit vers la catastrophe. Je ne vais pas m’étendre sur l’importance de limiter et de recycler ses déchets.

J’aimerais juste insister sur un point, parce qu’il m’est moi-même arrivé de l’oublier : prenez des sacs poubelles quand vous allez en forêt. Ça ne pèse rien, ça vous permettra de tout emporter avec vous, et même peut-être au passage de ramasser deux-trois saloperies qui traînent. Laisser nos lieux sacrés plus propres qu’on les a trouvés, même d’un peu, est un devoir pour tout Européen indigène. A une échelle au-delà, la même chose est valable pour notre Terre et le temps que nous passons à sa surface. Certes, c’est l’effort de toute une vie. Mais quel est le sens de poster des jolies photos printanières, sinon pour glorifier la Vie ?

Bois de Hal (Donar Resikoffen, licence CC 3.0

Bois de Hal (Donar Resikoffen, licence CC 3.0

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