Toussaint : et si nous rendions hommage aux morts anonymes ?
Une fois de plus, c’est en-dehors de nos embryons avortés de communautés qu’il faut chercher des réflexions intéressantes en ces temps où le calendrier grégorien a fixé Samain. La blogosphère « païenne » francophone est morte, vive la blogosphère « païenne » francophone, etc
Pas d’humeur à ajouter grand-chose à l’article, si ce n’est que dans une civilisation normale (au sens guénonien du terme) on aurait des prêtres publics pour accomplir les rites adaptés afin que les fantômes des morts anonymes ne viennent pas hanter la Cité. De là à y voir, au moins mythiquement, la cause de certains de nos dysfonctionnements actuels, eh.
You may live to see man-made horrors beyond your comprehension.
Petit selfie pour la route :
Transi de René de Chalon par Ligier Richier, église Saint-Etienne de Bar-le-Duc, photo de MOSSOT — CC BY 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=15584796
Et puisque vous êtes là, prenez donc un morceau de Leconte de Lisle pour la route, puisque ce bogoss est maintenant officiellement mon poète francophone préféré.
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Le secret de la vie
Le secret de la vie est dans les tombes closes :
Ce qui n’est plus n’est tel que pour avoir été ;
Et le néant final des êtres et des choses
Est l’unique raison de leur réalité.
Ô vieille illusion, la première des causes !
Pourquoi nous éveiller de notre éternité,
Si, toi-même n’étant que leurre et vanité,
Le secret de la vie est dans les tombes closes ?
Hommes, bêtes et Dieux et monde illimité,
Tout cela jaillit, meurt de tes métamorphoses.
Dans les siècles, que tu fais naître et décomposes,
Ce qui n’est plus n’est tel que pour avoir été.
A travers tous les temps, splendides ou moroses,
L’esprit, rapide éclair, en leur vol emporté,
Conçoit fatalement sa propre inanité
Et le néant final des êtres et des choses.
Oui ! sans toi, qui n’es rien, rien n’aurait existé :
Amour, crimes, vertus, les poisons ni les roses.
Le rêve évanoui de tes oeuvres écloses
Est l’unique raison de leur réalité.
Ne reste pas inerte au seuil des portes closes,
Homme ! Sache mourir afin d’avoir été ;
Et, hors du tourbillon mystérieux des choses,
Cherche au fond de la tombe, en sa réalité,
Le secret de la vie.
Poèmes tragiques, 1884
Des os et débats