Passage

En la mémoire de Yves Kodratoff

1er président de l’association Les Enfants d’Yggdrasill, il a rejoint les ancêtres le 8 mars 2023. Pionnier de la religion germano-scandinave en France, il a aussi été le premier dans l’Ásatrú francophone à apprendre le vieux norrois pour étudier les Eddas et les sagas.

Ses traduction commentées de deux textes mythiques majeurs, le Hávamál et la Völuspá, ont servi à de nombreux païens. Il insistait aussi sur l’importance de la poésie et de la danse lors des cérémonies qu’il organisait, pour s’approcher de l’expérience d’un blót antique.

Ex-directeur de recherche au CNRS et auteur de plusieurs livres sur les runes, il a largement contribué au développement de notre religion en France. L’association Les Enfants d’Yggdrasill lui doit en partie son orientation apolitique et reconstructionniste, profondément enracinée dans l’étude des anciennes coutumes.



Voici un court poème composé en son honneur :

Norna dóms of notit hafði
Skylði fara fægir blóta,
Epli Heljar til eta í náfirði.
Vallands herr hörga nýrra
Skal drekka um skeið minni
Þess hét garmr galdrs fǫðurs.
Fjölkunnigr var Freyju ástvinr,
Spjöll opt hljóðaði heilagra goða!


Quand il vint au bout de la sentence des Nornes,
Il dût partir, le cultivateur des sacrifices,
Pour manger les pommes de Hel dans le ravin du cadavre.
La foule des nouveaux autels de France
Boira pendant longtemps en la mémoire
De celui qui se nommait « Molosse du Père des Incantations ».
Il était versé dans l’art magique, le bien-aimé de Freyja,
Souvent il chantait les histoires des dieux bénis !

* La « sentence des Nornes » est le temps de vie alloué à chaque être humain.
* Le « cultivateur des sacrifices » est une formule poétique pour désigner un païen, de même que le « molosse d’Odin ( = Père des Incantions) » désigne le chien. Son pseudonyme sur internet était hund-heiðinn, « chien de païen », un terme utilisé comme insulte par les chrétiens.
* « Manger les pommes de Hel » = mourir, et « le ravin du cadavre » = la tombe.
* « La foule des autels » est aussi une formule qui désigne ceux qui continuaient à honorer les Dieux.

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Gérer une maison hantée selon Athénodore de Tarse

Athénodore de Tarse (aussi nommé Athénodore le Cananite) était un philosophe grec païen de l’école stoïcienne qui a vécu au Ier siècle de l’ère chrétienne. Il est entres autres connu pour avoir enseigné la philosophie à Octavien (fils adoptif de Jules César, qui devint le premier empereur romain). Il lui avait appris à réciter l’alphabet en entier avant toute réaction de colère, pour se laisser le temps de voir si c’était vraiment une bonne idée de s’énerver ou s’il valait mieux garder son calme. On raconte aussi que, Octavien ayant l’habitude de faire venir secrètement de jeunes femmes dans ses appartements, Athénodore se fit passer pour l’une d’elles et lui expliqua que n’importe qui de mal intentionné pouvait en profiter pour s’introduire chez lui.

Alors qu’Athénodore rassemblait peu à peu des économies pour envisager d’acheter une maison, il en trouva une à vendre qui était très en-dessous des prix habituels et qui était donc dans ses moyens. La raison était simple : elle était hantée, c’est pourquoi le propriétaire voulait s’en débarrasser… mais personne n’en voulait ! Athénodore l’acheta sans hésiter et y emménagea. Y avant amené ses quelques affaires dans la journée (il ne possédait pas grand-chose), il passa la soirée à réfléchir et à écrire, faisant son oeuvre de philosophe. C’est alors que le fantôme apparut, agitant lourdement des chaînes et poussant de grands cris en s’approchant de lui (en tout cas, c’est ce que nous dit Pline le Jeune dans ses Lettres, XXVII, « de Pline à Sura »).

Que fit Athénodore ? Sans lever le nez de son travail, il dit simplement au fantôme qu’il l’avait entendu, mais qu’il était présentement occupé à son devoir de philosophe. Cependant, dès qu’il aurait fini, il lui accorderait bien entendu toute son attention à ce fantôme qui semblait en grande détresse. Et le fantôme… attendit.

Une fois l’heure de travail terminée, Athénodore se leva et s’approcha du fantôme, qui tourna les talons et se dirigea vers la sortie de la maison. L’apparition finit par s’arrêter dehors à un endroit donné, ne bougea plus, et finit par disparaître. Notre philosophe lui souhaita bonne nuit, marqua l’endroit avec un bâton, et alla se mettre tranquillement au lit.

Le lendemain matin, Athénodore retourna à l’endroit marqué par le bâton, et, ne voyant rien de spécial, emprunta une pelle à un ami et creusa. Il trouva à cet endroit un squelette enchaîné, qui avait été caché là. Puisant dans ses économies (il lui restait un peu d’argent, grâce au bas prix de la maison hantée), il fit organiser une cérémonie funéraire simple et sobre mais correcte, lors de laquelle les rites traditionnels furent accomplis et permirent au malheureux de gagner l’autre monde. Plus aucun phénomène étrange ne se produisit dans cette maison.

On raconte aussi que, pour sa grande sagesse, ayant participé au renversement d’un gouvernement corrompu, Athénodore de Tarse fut honoré dans sa ville natale par ses concitoyens reconnaissants, lors d’un rite annuel qui dura jusqu’à l’interdiction du paganisme dans l’empire romain.

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[TEMOIGNAGE COVID] Vers la fin de rites funéraires ?

Témoignage de Quitterie Solaire, thanatopracteur et artisane à l’Atelier Prospère, à propos du silence général dans lequel les mesures gouvernementales mettent fin aux rites funéraires, fondements indispensables de toute civilisation vivante :

En tant qu’actrice du funéraire, j’ai subi une interdiction temporaire d’exercer les soins et les toilettes au début de la crise en avril dernier. Nous n’avions plus le droit de manipuler les défunts, ni de les toiletter, ni rien du tout. La mise en bière et la fermeture immédiate du cercueil étaient négligemment cochées par les médecins signant l’acte de décès, privant les familles d’un si précieux recueillement, et classant ces morts comme pestiférés, au même titre que ceux atteints de maladies hautement contagieuses, telles que la peste, le choléra ou encore Creutzfeldt-Jakob…

Alors que nous n’avons toujours pas d’information officielle sur la contagion post-mortem effective du Covid, la mesure de précaution s’allonge indéfiniment, interdisant carrément les familles et les proches, de veillée funèbre et d’une amorce de deuil apaisé.


Je vous parle bien de toutes les attentions que les vivants vont porter naturellement à leurs morts, dans cet espace-temps sacré qui survient juste après le décès, jusqu’au moment de la mise en bière. Ce moment hors du temps, qui en fonction des traditions, dure plus ou moins longtemps et durant lequel les proches défilent auprès du défunt, qui pour un dernier adieu, qui pour panser des plaies, qui pour constater dans l’intensité d’un ressenti le départ, ou encore pour célébrer le passage vers un autre état, vers un monde meilleur. Chacun à sa façon, toujours en dévotion. La veillée funèbre ressemble fort à s’y méprendre à un ultime rempart contre la déshumanisation du monde cruel qui semble émerger, dans le marasme de ses « mesures », de ses « crises », de ses errements…


Voyez-vous où je veux en venir? On parle de suppression pure et simple de toute forme de recueillement, de rites funéraires. Les rites funéraires, la base de toute humanité !


Quand on se pose la question de ce qui la définit en tant que telle, ce qui constitue les fondations d’une civilisation, d’une époque, la première chose que l’on observe, à bien des niveaux, ce sont eux, les rites funéraires, le respect porté aux morts et l’aspect sacré et intouchable de tout cela.

Alors quand j’ai entendu mes collègues m’annoncer au début du premier confinement, à quel point cela les choquait, eux, les pros, les anciens du métier, les croques-morts de campagne, qu’en 30 ans ils n’avaient jamais vu ça, que les familles ne venaient même plus au cimetière, n’écrivaient plus de discours, plus d’hommage, plus de messes, plus de fleurs, rien, qu’ils enterraient les gens comme des chiens, qu’on versait le cercueil dans la tombe et qu’en trente minutes, c’était plié, et qu’à ce rythme là, on en ferait 10 par jour ! Mes collègues, les durs à émouvoir, là ça leur a fait drôle, ils étaient tout chose de tant de froideur, ça les laisse encore ahuris. Le métier change. Toujours plus impersonnel.

Là, les copains, là… vous pouvez être sûrs que, socialement, humainement, parlant, il y a eu une bascule. Une chute grave vers l’inhumanité, le mépris, l’abandon, la fin des principes fondateurs.


Mais il reste des gens qui ne verseront pas dans l’abîme sans fond leur souvenirs précieux et leurs nobles sentiments, qui continueront à se battre pour que la Vie prenne le pas sur la Mort, toujours. Parce qu’accompagner le corps sans vie, c’est rester vivant soi-même, c’est honorer l’étincelle mystérieuse qui nous anime et participer au grand cycle immuable. C’est ici que nous pouvons trouver le réconfort, la vitalité et la verticalité de ce qui a toujours été et sera toujours.

Je vous invite à prendre un peu de votre temps et à découvrir et soutenir ce collectif de soutien aux familles de victimes retenues en otage dans les Ehpad, les hôpitaux et les cliniques, afin d’exiger un droit de visite aux mourants : https://www.tenirtamain.fr

Je vous embrasse, prenez soin de vous… et de vos morts.

Ce témoignage fait écho à l’entretien donné au magazine l’Inactuelle par Andreea-Maria Lemnaru, chercheuse en Philosophie et en Histoire des Religions à la Sorbonne, spécialiste de l’école néoplatonicienne (les derniers philosophes grecs païens) : “Le monde moderne face à la mort

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Fêtes et rites de passage dans la tradition germano-scandinave

Certains moments de la journée (aube, midi, crépuscule, minuit) sont particulièrement sacrés. De la même manière, certaines journées sont plus sacrées que d’autres. Dans notre tradition, elles correspondent aux jours de fête, répartis le long de l’année et célébrant l’été qui revient après l’hiver, d’autre part aux rites de passage, qui marquent les grands moments de notre vie et qui célèbrent le fait que les générations se succèdent, chacun devenant tour à tour héritier puis Ancêtre.

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Résurgence du zoroastrisme au Kurdistan irakien

Source : http://geopolis.francetvinfo.fr/daech-fait-renaitre-le-zoroastrisme-de-ses-cendres-au-kurdistan-irakien-64971

zoroastriens-iraniens-au-festival-annuel-sadeh_0Face à la pression du fanatisme de leurs voisins arabes, des Kurdes irakiens ont célébré le 1er mai dernier, autour d’un grand feu sacré, un rite de ré-adoption des coutumes zoroastriennes après plusieurs siècles d’islamisation forcée. Mise à part la minorité yézidie, qui en pratique une version spécifique, cette religion avait disparu du Kurdistan, et ne persistait que faiblement en Iran (30.000 adeptes) et en ailleurs en exil (170.000 adeptes, la plupart en Inde dans la communauté pârsi). Le gouvernement autonome du Kurdistan irakien a reconnu cette nouvelle communauté religieuse et travaille à ce que leur juste place dans la société soit garantie, et ce d’autant plus qu’elle signifie un retour aux sources de la culture kurde.

Le zoroastrisme est une religion monothéiste non-abrahamique, c’est-à-dire qu’elle n’est pas issue du judaïsme. Il s’agit d’une réforme, par le prophète Zarathustra, de la religion traditionnelle des Perses, peuple indo-iranien. Malgré ces changements importants dans la religion, les rites gardent la trace de l’antique paganisme indo-européen, par exemple dans le précepte « Humata, Hukhta, Huvarshta » (bonne pensée, bonne parole, bonne action) ou dans la persistance de divinités en tant qu’émanations ou serviteurs du dieu suprême, Ahura Mazda.

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