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Différencier « clairières néodruidiques » et « clans celtiques »

« Une clairière néodruidique est une institution moderne (datant de la fin du XVIIIe siècle) qui vise à procurer des initiations néodruidiques et à se retrouver entre personnes ayant reçues lesdites initiations, selon un mode de fonctionnement similaire à la franc-maçonnerie.

Un clan celtique est un groupe de personnes, liées par une fraternité de sang ou par une fraternité jurée, qui pratiquent au quotidien les traditions celtiques, en particulier en matière de rites et d’éthique. Cela se fait sur le modèle des institutions tribales celtiques, qui remontent à l’Antiquité et ont continué après la fin de l’institution druidique et par-delà la christianisation. C’est la forme qui est préférée par la majorité des païens celtiques reconstructionnistes aujourd’hui dans le monde, sauf peut-être chez les francophones.

Ceux qui optent pour une forme clanique considèrent en général que le titre de « druide » ne peut se porter qu’après vingt années de pratique et d’étude intensives des savoirs druidiques (lesquels sont pour la plupart à reconstituer), cette période devant mener à un apprentissage exhaustif, et ce uniquement par voie orale. Conclusion évidente : 99%, si ce n’est 99,99%, si ce n’est la totalité, des gens qui se donnent un tel titre ne remplissent pas ce critère.

Pour ce qui nous concerne, après dix années de lectures universitaires, de pratique régulière des rites, et d’échanges avec les néodruides francophones les plus pointus comme avec les reconstructionnistes gaéliques les plus sérieux, nous estimons que nous serions seulement tout juste en mesure de commencer à essayer de reconstituer le fameux corpus, qui serait à apprendre entièrement par coeur par le candidat au rang de druide.

Autant dire que ce n’est pas pour tout de suite, et possiblement pas pour notre génération – mais comme les structures claniques ont par essence une vocation transgénérationnelle, ce n’est pas un si gros problème. Notre génération pose les bases d’une communauté fonctionnelle, solidaire, et vivante. La génération suivante structurera cette communauté et verra en émerger des meneurs talentueux, dévoués et bien formés. La génération qui viendra encore après celle-ci aura le terrain prêt pour une éclosion complète et naturelle d’une institution druidique qui sera à la fois issue des plus anciennes et plus authentiques traditions, apte à exercer pleinement ses responsabilités dans les défis inouïs de son époque, et dédiée à bâtir un avenir pour les générations futures des siècles à venir. »

(communication du clan Beltan concernant le très intéressant projet « Paroles de druides« )

 

 

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L’espace sacré dans la tradition celtique

Contribution du clan Beltan au projet « Paroles de druides », thème n°2.

Entre-temps est paru la brillante synthèse de Matthieu Poux (le chercheur français le plus en pointe en archéologie religieuse celtique) : Définition et fonction de l’espace consacré en Gaule indépendante.

I) Préliminaires

L’espace sacré est un des principaux éléments du rite, qui est la rencontre d’un moment, d’un lieu, d’une assemblée, et d’une liturgie. Le lieu a ceci de particulier que, contrairement aux autres éléments, il subsiste entre les rites, et doit être maintenu en état.

Les lieux sacrés sont donc d’abord ceux que la tradition nous prescrit de respecter et de protéger : sanctuaires antiques (Indiculus Superstitionum Et Paganiarum, IV ; J.-L. BRUNAUX, Les religions gauloises), sources et fontaines (ISEP, XI ; J. LACROIX, Le celtique dēvo- et les eaux sacrées), pierres levées (ISEP, VII), bois et arbres sacrés (ISEP, VI ; MAXIME DE TYR, Dissertations, VIII, 8 ; E. ASTIER, La sacralisation de l’espace par le centre dans l’idéologie celtique), sépultures des ancêtres (ISEP, I & XXV)… Pour la survivance de la sacralité de ces lieux, on peut consulter les ouvrages de Dominique Camus, comme Tombes guérisseuses, arbres à souhaits et lieux sacrés en Bretagne ; on trouvera aussi, dans de nombreux cas, des indices concernant la christianisation de lieux de culte celtique sous le vocable d’un saint catholique auquel sera dédié la chapelle, église, ou cathédrale (P. WALTER, Saint-Corentin et l’anguille de la fontaine ; D. GRICOURT & D. HOLLARD, Les saints jumeaux héritiers des dioscures celtiques : Lugle et Luglien et autres frères apparentés ; P. LAJOYE, Raven et Rasiphe : des jumeaux mythologiques ?). A ces lieux sacrés traditionnels, il faut ajouter l’autel domestique et, de manière élargie, la demeure et son terrain (ISEP, XVII & XXIII & XXVIII), ainsi que, le cas échéant, le sanctuaire dans lequel un groupe contemporain célèbre ses rites.

On notera que les religions abrahamiques n’ont en général pas d’espace sacré à la base. Le judaïsme en a un seul, le Temple de Jérusalem, dont la destruction a donné une place un peu plus importante aux lieux de rassemblement et d’enseignement, les synagogues. De même, l’islam n’en a qu’un, la Mecque, reprise directe de ce sanctuaire païen arabe ; les mosquées sont essentiellement des lieux de rassemblement et des « collecteurs » qui canalisent les prières vers la Mecque, dont la direction est toujours indiquée par un minbar. Quant au christianisme, il n’a à l’origine pas d’espace sacré, et ne développera que plus tard le recueillement sur les sépultures des martyrs, puis la transformation de sanctuaires païens en cathédrales, églises et chapelles. Les formes de christianisme et d’Islam qui recherchent un retour à leur pureté originelle (protestantisme évangélique, Témoins de Jéhovah, Frères Musulmans, salafisme) sont d’ailleurs fermement opposées aux espaces sacrés, hérités des religions païennes.

Au contraire, les religions traditionnelles ont un rapport à l’espace qui ancre localement le sacré. Chaque espace sacré possède une sacralité qui lui est propre, et n’est pas qu’un portail vers un Sacré unique, et encore moins un simple lieu conventionnel de rassemblement des fidèles. Le lieu fait partie intégrante du rite en modulant l’expression de la liturgie ; et, inversement, le rite va entraîner une modification du lieu, en l’aménageant de manière à ce que la liturgie puisse s’y dérouler, en y laissant des offrandes votives, et enfin en chargeant le lieu de puissance sacrée. C’est la raison pour laquelle un endroit récemment consacré est moins puissant qu’un sanctuaire antique dans lequel des rites ont été régulièrement célèbrés pendant des siècles, voire des millénaires, et c’est aussi la raison pour laquelle célébrer ses rites en un lieu donné leur confère davantage de force que de changer de lieu à chaque fois.

[Puisque nous parlons « d’espace sacré », il peut être important de faire une courte digression concernant le « sacré » celtique. Il s’agit en réalité de deux concepts différents, bien que reliés. Comme souvent, seul l’irlandais a conservé les deux termes : noíb (gaulois noibos, gallois nwyf, breton *noav) et síd (gaulois *sedos ou *sedon, gallois hedd conservé dans le sens de « paix, repos », breton *hez conservé sous la forme du forme du verbe désuet hezañ = « cesser, être en paix, demeurer »).

Le noibos vient d’une racine signifiant aussi « brillant, éclatant », et son descendant gallois nwyf a le sens de « vigueur, passion ». En irlandais, il a gardé le sens de « sacré », et a été utilisé pour traduire le terme chrétien de « saint ». C’est l’équivalent du grec ancien hieros ou du germanique *hailaz : une force vitale qui circule entre les lieux de ce monde et avec les autres mondes, entre les humains et avec les dieux, ancêtres et génies. Chaque endroit a donc plus ou moins de sacralité noibos selon les moments et selon les rites qui s’y déroulent.

Le sedos, au contraire, est presque littéralement une « demeure », si ce n’est un « lieu de repos ». C’est un lieu qui est séparé de l’activité humaine et profane : il est dédié à une divinité, et devient sa propriété exclusive à tous points de vue, à tel point qu’il ne fait même plus partie du monde des mortels. C’est l’équivalent du grec ancien hagios ou du germanique *wihaz. Un endroit donné n’est pas plus ou moins sedos : il l’est complètement ou ne l’est pas. Selon les moments, toutefois, le ou les habitants du sedos peuvent permettre à certains humains d’y pénétrer, ou au contraire l’interdire strictement.]

II) Les différents espaces sacrés

Chaque endroit possède son génie (boudig en breton), qui est d’une nature différente en fonction du lieu : génie des bois, des pierres, des eaux. Certains génies sont portés à poser des problèmes aux humains même bien intentionnés, ce sont les duses (gaulois dusios, breton duz ou diminutif duzig). Les génies aquatiques, généralement féminins, sont présents dans tous les plans d’eaux, mais celles des sources sont les plus honorées, en particulier lors de la fête de lustration hivernale nommée Imbolc en Irlande. Quant aux génies des pierres levées, les « nains » (gaulois *corros, breton korr ou diminutif korrigan) ils habitent les sites mégalithiques : contrairement à une idée courante , ces « espaces sacrés » ne sont pas les principaux lieu de culte celtique. On peut y faire des offrandes pour la fertilité de la terre et des gens, mais uniquement en-dehors des grandes fêtes calendaires, en particulier des plus importantes, où les frontières qui séparent notre monde de l’autre monde s’estompent (celles que les Irlandais nomment Samhain et Beltaine, respectivement Kala-Goañv et Kala-Hañv en breton).

Les rites calendaires dédiés aux dieux célestes ont lieu dans un sanctuaire (gaulois nemeton, breton neved) qui est le principal espace sacré de la religion celtique. Les plans de ces nemeta sont à présent connus par les fouilles archéologiques (J.-L. BRUNAUX, Les religions gauloises). Comme leur construction, même à petite échelle, nécessitent un certain investissement en temps, en argent, et la propriété du foncier, les rites peuvent également se célébrer autour du foyer domestique. Il s’agit de l’espace sacré des rites quotidiens, qui est seulement second en importance derrière le sanctuaire collectif. Un petit autel suffit à disposer d’une bougie, d’un encensoir, d’un bol d’eau pour les purifications, d’un bol à offrandes, et le cas échéant de symboles des entités honorées : génie du foyer, ancêtres, et divinité(s) tutélaire(s) de la famille.

Nemeton Berularias

Le Nemeton Berularias, desservi jusqu’en 2017 par Matolitus de la Celtiacon Certocredaron Credima.

Il faut également évoquer un troisième type de sanctuaire, qui n’est ni celui des druides (première fonction indo-européenne), le nemeton, ni celui des gens du commun (troisième fonction indo-européenne), le foyer. C’est celui des nobles et guerriers (deuxième fonction indo-européenne), désignés par César (Commentaires sur la guerre des Gaules) sous le nom de « chevaliers » (equites). De grands enclos ont été retrouvés dans divers endroits en Gaule, avec pour seules traces archéologiques des restes très conséquents de nourriture festive (amphores contenant des boissons alcoolisées, ossements d’animaux abattus pour leur viande) ou d’ustensiles alimentaires, déposés au même moment, en quantités très importantes, et souvent triés par types. Cela fait écho à plusieurs textes classiques (Posidonius d’Apamée à propos du prince Luern, Phylarque à propos d’un certain chef celte nommé Ariamnès) et irlandais (par exemple le Festin de Bricmiu) décrivant explicitement de grands festins à but autant socio-politique que sacré, donnés par des chefs importants (M. POUX, Espaces votifs – espaces festifs. Banquets et rites de libation en contexte de sanctuaires et d’enclos). Il s’agit là de la confirmation qu’il a existé chez les Celtes des lieux dédiés à un rite aristocratique, celui du banquet rituel (gaulois ulidos, breton perunvan *glez / breton vannetais gloé / vieux breton gluet, gallois gwledd, vieil irlandais fled), rite qui était commun avec le reste de l’Europe (vieux norrois sumbl, grec ancien symposion).

III) Les différentes échelles

Pour finir, il faut également prendre en compte le fait que « l’espace sacré » se conçoit également, d’un point de vue celtique, à un niveau plus large, celui de la géographie. Le territoire de chaque peuple est délimité par une frontière qui est analogue aux limites qui caractérisent l’espace sacré du sanctuaire ou du domaine familial (V. RAYDON & C. STERCKX, Saint Goëznou et la fourche du Dagda), et cette frontière est parsemée de lieux de la forme *icuoranda ou *egoranda (P.-Y. LAMBERT, Dictionnaire de la langue gauloise ; J. LACROIX, Les noms d’origine gauloise). Au milieu, en tout cas géopolitique, de ce territoire se trouve un sanctuaire lié au rites de royauté, par exemple Tara en Irlande (E. ASTIER, La sacralisation de l’espace par le centre dans l’idéologie celtique), à partir duquel plusieurs secteurs sont découpés, reliés par ce centre sacré. Ces secteurs sont originellement au nombre de quatre, chacun orienté vers un point cardinal ; l’ancienneté de cette division en quatre est renforcée par le fait qu’elle n’est pas attestée qu’en Irlande, mais aussi dans plusieurs textes indo-iraniens (G. DUMEZIL, Mythe et Épopée vol. 2). Aujourd’hui encore en Bretagne, le grand pèlerinage circulaire du Tro Breizh continue à faire vivre cette ancienne coutume de la circumambulation, transposée du sanctuaire (parcours de circumambulation attestés dans de nombreux fanum gallo-romains, équivalents aux espaces dédiés à cette pratique en Inde, où elle est nommée pradakshina) au pays dans ses anciennes frontières (B. RIO, Les Sept Saints). On notera également, comme intermédiaire au niveau local, la procession circulaire de 12km de la Grande Troménie de Lokorn / Locronan, qui fait tous les 7 ans le tour du bois de Neved (gaulois nemeton).

IV) Les espaces sacrés du clan Beltan

Nous nous réunissons fréquemment dans un bois dédié par sa propriétaire aux cultes païens. Nous y avons aménagé une clairière, au centre de laquelle un trou a été creusé à Samonios et consacré comme le centre de notre monde, avant qu’un grand tronc n’y soit érigé. C’est ici que nous faisons nos offrandes aux génies de la forêt quand nous arrivons. Autour du feu où nous nos asseyons pour festoyer, se trouve un poteau qui est arrosé d’une libation en l’honneur des divinités de notre clan. Nous plaçons également une part de viande dans le feu, pour nos ancêtres qui sont invités à partager ce banquet avec nous.

Non loin de là, dans ce même bois, se trouve un santuaire-sedos, consacré par un aspirant druide de la Celtiacon Certocredaron Credima. Il est dédié à Cernunnos, qui est vraisemblablement à l’origine du nom du village situé à proximité du bois, sous une forme latinisée et christianisée. Nous n’y pénétrons que pour l’honorer spécifiquement, et nous retirons ensuite dans notre clairière pour les libations et le repas.

Lors de la fête d’Imbolc / Kala-C’hwevrer, nous avons aussi pour coutume d’aller faire une offrande à Sequana.

Ces éléments ont seulement valeur d’exemple, étant donné qu’ils reflètent à la fois notre évolution vers des pratiques plus authentiques, et le changement progressif du centre de gravité géographique du clan, initialement à Lutèce et à présent de plus en plus à l’ouest.

V) Conclusion

Pour résumer cet exposé quelque peu tortueux :

* Le lieu est un des éléments indispensables du rite

* Notre premier devoir vis-à-vis d’un espace sacré est son respect et sa préservation

* Tout espace est plus ou moins sacré dans le sens du noibos (énergie sacrée), mais certains espaces sont sedos (dédiés à une entité et n’appartenant pas au monde des humains)

* Les rites quotidiens se pratiquent auprès de l’autel domestique, et les rites ponctuels près d’un lieu sacré (source, arbre sacré, pierres levées, sépulture, …)

* Le rite aristocratique / guerrier du banquet se pratique normalement dans des enclos spécifiques

* Les grands rites annuels ont normalement lieu dans un nemeton permanent, aménagé et consacré

* Les espaces sacrés sont organisés autour d’un centre, de portions (canoniquement 4, orientées aux points cardinaux), et de limites bien définies. Ils s’emboîtent les uns dans les autres : domaine familial, ville ou village, terroir, nation

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Hefnatafl & hydromel : traditions germano-scandinaves

Les « loisirs » des Anciens étaient des moyens de développer leur patrimoine. Le jeu d’échecs (tafl) et le brassage d’hydromel en sont deux bonnes illustrations. Une activité intellectuelle comme le tafl permet de développer son cerveau, mais est était aussi une manière de s’élever socialement car c’est un attribut royal. Brasser l’hydromel est une activité artisanale qui permet de produire de la boisson enivrante, mais c’est aussi un acte magico-religieux qui renouvelle les liens entre les Divinités du ciel et de la terre, entre le divin et l’humain, et aussi au sein du clan.

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A quoi peut encore servir la politique ?

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Classical Numismatic Group, Inc. http://www.cngcoins.com CC BY-SA 3.0

J’aime l’exemple des empereurs romains du Bas-Empire. Contrairement aux idées reçues, ils ne furent point des décadents. Au contraire, la valeur d’un Marc-Aurèle, d’un Julien, d’un Septime Sévère, Claude II, Probus, Aurélien, Valentinien, Théodose, Dioclétien ou d’un Constantin, est d’un rare mérite. Ce sont des hommes d’Etat et des soldats hors pairs, peut-être supérieurs à des Auguste ou des Césars. Pourtant, ils combattaient et régentaient dans le vent. Par leur puissance et leur énergie, ils parvinrent qu’à ralentir la mort d’un corps politique qui pourtant l’était déjà, l’Empire.

De Gaulle, le dernier des grands Français, avait tout compris. Dans « les Chênes qu’on abat… », dialogues avec Malraux, il reconnaît qu’il aura écrit la dernière page de l’Histoire de France, et il sait que ce qui n’est qu’une morphologie politique parmi tant d’autres, la France, était vouée à se transformer considérablement, comme l’Empire Romain du Ve siècle commença lui-même  à se transformer pour voir apparaître de nouvelles formes politiques, et, en quelque sorte, une nouvelle Histoire.

Désormais, à quoi sert donc la politique, si elle n’est plus qu’un théâtre d’ombres jouant au  pouvoir et rêvant à des restaurations impossibles ? Plus grand’chose, assurément. Toutefois, la politique a encore un rôle à jouer.

Si elle ne cherche qu’à retarder, qu’à restaurer, alors elle échouera, et le temps qu’elle fera perdre aux hommes sera catastrophique.  Mais elle peut envisager un autre objet : permettre l’accouchement du monde en germes en protégeant dans le chérubin ce qu’il y a de plus utile. Pour y parvenir, sa dignité sera de se retirer au maximum.

Les Européens, et parmi eux les Français, crèvent de déresponsabilisation. Quand leur corps politique était encore vivant et vivace, ils jetaient leurs yeux au Ciel et voyaient l’Etat, qui les embrassait dans une puissance commune ; il les protégeait, et les projetait. Aujourd’hui, quand leur corps politique n’est plus qu’une fiction, et qu’ils n’ont plus par conséquent qu’une fiction d’Etat, ils persistent à jeter leur yeux au Ciel mais ne voient plus rien. Le Salut par la politique n’est plus ; mais, misérables qu’ils sont, il attendent, à cause d’une trop longue habitude, les genoux à terre et les mains suppliantes. D’où les angoisses actuelles, la turbidité, la nervosité qu’aucune force ne semble pouvoir épancher.

http://www.rochedy.fr/2015/12/a-quoi-peut-servir-la-politique-dans-le-monde-nouveau.html

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L’importance de la réalité concrète dans la résurgence de la spiritualité germanique (B. Linzie)

Traduction de la partie 4.3 de l’essai « Germanic spirituality » de Bil Linzie, un des théoriciens et premiers pratiquants du reconstructionnisme germano-scandinave aux Etats-Unis. Vous pouvez trouver un résumé de cet essai de 50 pages, et un lien pour le télécharger en entier dans sa version originale en anglais, ici, la traduction de l’introduction , et la traduction des parties 4.1 et 4.2 en cliquant dessus.

On observe une sorte de hausse dans l’opinion qu’un groupe a de lui-même lorsqu’il commence à devenir son propre contexte culturel. C’est-à-dire que ce groupe ne sent plus le besoin de dépendre d’autres groupes pour savoir comment il faut s’habiller, comment se comporter, comment parler, quelle type de musique est acceptable, quel type de cuisine est de haute qualité gastronomique, qu’est-ce qui est beau et ne l’est pas, etc. Les anglophones désignent cela par le terme de pride (fierté) : black pride, gay pride, … Les premiers reconstructionnistes utilisèrent donc le terme white pride [NdT : l’immense majorité des Américains de couleur blanche sont des Anglo-saxons, des Allemands ou des Scandinaves, ou des Irlando-écossais dont les coutumes ancestrales sont très proches, d’où l’assimilation logique de ces cultures à la couleur blanche de ceux qui les portent]. Cela provoqua une levée de barricades et de références injurieuses au Ku Klux Klan, au nazisme, au racisme, au « suprémacisme blanc ». Le but initial était simplement le refus de veiller, en permanence, à cacher honteusement ses origines comme un juif dans les années 30 ; et ce pour la simple et bonne raison que la culture germanique était toute aussi riche et importante à préserver que les autres.

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L’importance du contexte dans la résurgence de la spiritualité germanique (par Bil Lizie)

Traduction de la partie 4.1 de l’essai « Germanic spirituality » de Bil Linzie, un des théoriciens et premiers pratiquants du reconstructionnisme germano-scandinave aux Etats-Unis. Vous pouvez trouver un résumé de cet essai de 50 pages, et un lien pour le télécharger en entier dans sa version originale en anglais, ici et la traduction de l’introduction .

Quand on pense à l’Asatru, en général, on pense aux oracles runiques, aux blots, aux costumes traditionnels (généralement de l’ère viking) avec épées et bijoux d’ambre, au seidr, à des rites dans des langues étrangères et anciennes. En réalité, ce qu’on en sait par les sources qui nous sont parvenues est beaucoup plus subtil et moins mystique que l’idée qu’on s’en fait. La plupart des nouveaux arrivants, mais aussi de la plupart des anciens, veulent que l’Asatru soit une religion à part entière. C’est sans doute vrai, mais l’Asatru a sans doute plus à voir avec la subtilité du taoïsme ou du zen qu’avec la pompe de l’Eglise catholique ou la théâtralité de la Wicca.

Ces dernières décennies, l’approche de la spiritualité germanique s’est surtout faite via des aspects accessoires : les runes, les blots, et maintenant le seidr. Si certaines religions modernes fonctionnent très bien ainsi, la plupart des religions traditionnelles marchent autrement. Les Amérindiens en ont fait la cruelle expérience. Ainsi, depuis les années 60, de plus en plus de gens se sont intéressés à leurs spiritualités. Beaucoup d’Américains blancs, ayant séparé leur spiritualité de leur culture et ayant au passage bien souvent perdu les deux, furent fascinés par les cérémonies amérindiennes et commencèrent à les imiter : loges de sudation, cérémonie du calumet, danse du soleil, cérémonie du peyotl, … Au début, beaucoup d’Amérindiens en furent très contents : des gens s’intéressaient enfin à leur mode de vie. Très rapidement, il devint évident que ce n’était pas leur « mode de vie » qui les intéressait. C’était le charme et le glamour des plumes dans les cheveux, des herbes et des calumets achetés par correspondance plutôt que ramassés ou faits soi-même. Ce n’était pas leur mode de vie, avec tout ce qu’il comprend de difficile et de douloureux, c’était le fait de porter des noms cools comme Loup Solaire ou Arbre-Dragon. Changer réellement son mode de vie, c’était trop dur et pas assez gratifiant socialement. Alors, les sages des Amérindiens ont commencé à refuser cela, car leurs cérémonies étaient des expressions de leur culture et que les Blancs continuaient à considérer cette même culture comme un vieux machin inutile et barbare.

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« Etude des liens entre suicide et révolution industrielle », par T. Isabel

Ce texte m’a semblé très pertinent par rapport à des questions que j’entends souvent, et qui tournent en gros autour de deux grands axes : 1) quel intérêt d’avoir une religion au XXIème siècle, surtout une religion traditionnelle (sous-entendu, par essence archaïque et inadaptée aux enjeux actuels) ?, et 2) en tant que païen/ne, quel intérêt d’avoir une pratique collective, d’appartenir à une communauté, alors que la pratique solitaire laisse tellement plus de « liberté » (sous-entendu, nécessite moins de sortir du cadre de l’individualisme occidental) ?

Après cette courte introduction, je laisse place à l’article, en précisant qu’aux Etats-Unis, le taux de suicide, de dépression, et d’addiction des « Spiritual But Not Religious » (c’est-à-dire des gens qui se définissent comme étant en recherche spirituelle mais n’appartenant à aucune communauté) est plus élevé que celui des croyants pratiquants mais même que celui des athées.

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