(Article rédigé par Baldric Hartmann, chef du clan Liddle Franke de l’association Les Enfants d’Yggdrasill)
Dans beaucoup de pratiques païennes du monde entier, il y a des autels aux Ancêtres et aux Dieux, que ce soit dans le shintoïsme, le bouddhisme… Il en va de même pour nos traditions européennes, y compris dans l’Àsatrù. Mon autel qui est en photo est un exemple parmi d’autres et évoluera sans doute au fil du temps.
1 – L’utilité :
Il est utile pour la pratique quotidienne et domestique, permet à ceux qui n’ont pas de jardin de pouvoir vivre leur culte (seul ou accompagné), le mieux étant avec la famille sauf s’ils ne partagent pas votre religion. Il permet aussi de se recentrer sur soi-même et de pouvoir célébrer les fêtes dans le cas où vous n’auriez pas de vé ou que vous n’avez pas le temps de vous y rendre (distance, emploi du temps chargé…).
La pratique à l’autel se fait le plus souvent à l’aurore, ou au crépuscule. Votre autel vous permettra de saluer et remercier vos Ancêtres, de prier une Divinité ou tout simplement de méditer.
2 – La conception :
Faire son autel est avant tout un acte personnel, clanique, ou familial. La conception est assez libre même si certaines règles peuvent entrer en compte en ce qui me concerne : il est préférable de prendre des objets issus de l’artisanat, en matériaux naturels, mais le mieux étant encore que ce soit fait de votre main (ou de membres de votre famille) afin de garantir la perpétuité ancestrale, un des plus grands fondements de notre religion.
À titre d’exemple (voir photo) : le bol central en terre cuite est fait par ma mère et permet d’y déposer les offrandes liquides (libations) ; celui en haut à droite également, fait par ma mère, recueille un peu de terre du vé, le sanctuaire où je pratique avec mon clan, cette terre étant chargée d’histoire et de bonnes énergies.
L’idole de Donar que vous pouvez voir à droite est faite main par moi même, il est accompagné d’une joubarbe (barbe de Jupiter, apparentée à Donar en mythologie comparée), utilisé pour repousser les mauvais esprits en Germanie du nord. Plus en bas vous pouvez voir une branche qui appartient au frêne que j’ai consacré pour accueillir les offrandes à ses racines. Il y a aussi des glands que j’ai récupérés en forêt et posé en guise d’offrande.
La pierre en bas à gauche du bol à offrande fût récupérée au pied du dolmen de Janville-sur-Juine, où furent inhumés les corps d’anciens Européens. Elle fut récupérée après avoir versé de la bière pour ces morts.
Juste en haut se trouve un encensoir que j’ai sculpté dans du bois et pyrogravé du futhark, l’encens (j’utilise du papier d’Arménie) permet d’annihiler les mauvaises ondes, de poser une ambiance non négligeable et d’imiter la fumée du foyer.
La corne à boire est essentielle pour verser les libations, car il est souvent considéré comme irrespectueux d’utiliser directement la bouteille ou canette pour notre culte.
La lucarne tout en haut désigne le feu de l’âtre, celui des halles des anciens, qui permettait – en plus de cuisiner- la pratique du culte domestique. J’ai simplement trouvé cet objet dans les encombrants, mais je l’ai restauré et elle est apte à traverser le temps et à être transmise à ma descendance.
Pour finir, la bouteille en haut à gauche permet de recueillir les offrandes liquides avant de les rendre à la terre via l’arbre sacré.
J’ai placé mon autel dans une alcôve de mon grenier face au couchant car je n’ai pas eu le choix. L’ouest représente une mort qui annonce déjà une renaissance à l’est, où je suis placé. L’idole de l’anse Donar se trouve donc au nord. Il est préférable d’avoir une fenêtre pour au moins voir le ciel, mais vous pouvez également placer votre autel dans votre jardin. Vous pouvez y placer des objets ancestraux dont vous auriez hérité, ou des photos de famille.
Pour conclure, la conception de votre autel est libre, le but étant que vous y soyez à l’aise et que vous en soyez le propre architecte (pas prédéfini par un quelconque vendeur d’autel qu’on peu voir sur le net).
3 – L’utilisation :
Prenez un peu de temps pour réfléchir, allumez votre bougie et méditez sur l’histoire de votre famille, une sagesse que vous aurait dévoilé votre défunt grand père/mère (ou votre clan, vos amis…). Accueillez les éventuels esprits des lieux à se joindre à vous.
Vous pouvez vous munir d’une boisson alcoolisée préalablement versée dans votre corne, mais aussi déposer des denrées naturelles (pas un plat préparé issu de la grande distrib’, quoi !). Cela peut être du pain, de la charcuterie, un fruit, du miel (pour ça vous pouvez utiliser un autre bol à offrande) ou même un objet…
Pour les remerciements aux ancêtres, vous pouvez le faire avant ou après manger le soir, en les invoquant avec des paroles respectueuses de votre confection. Il faut que cela vienne du coeur, mais vous pouvez vous contenter d’une formule tout faite, comme « salut à vous, ancêtres de ma lignée ! ». Après avoir fini votre discours vous pouvez lever la corne en disant « hail ! » ou « heel » (selon votre tradition), trempez vos lèvres ou buvez une gorgée avant de verser dans le bol prévu à cet effet.
Vous pouvez très bien remercier vos ancêtres au sens large comme un membre défunt en particulier, voir même un couple, ou des oncles et tantes par alliance. Le lien du sang est important, l’alliance tout autant.
Si vous avez envie d’invoquer une Divinité, la procédure ne change pas vraiment. Si vous invoquez pour remercier, vous pouvez très bien offrir un élément en rapport avec une divinité qui vous aurait aidé. Par exemple, vous êtes partis en mer pour pêcher et avez eu une bonne pêche, vous pouvez très bien déposer un peu de votre prise (pas simplement les arêtes) ou bien un peu du plat que vous avez cuisiné avec, pour remercier Rán et Ægir.
N’hésitez pas à les saluer en contant leurs histoires ou hauts faits : « salut à vous Rán et Ægir, gardienne et gardien des océans, mère et père des neufs vagues, grands parents de Heimdall. Merci pour cette nourriture. Hail! »
La méditation est efficace pour se recentrer et se ressourcer après une journée bien remplie. Soyez confortablement installé et respirez. Pesez les bons éléments et les mauvais de votre journée, et tirez en de la sagesse pour vos jours futurs. Cette session que j’ai nommée « l’instant Mimir » peut permettre -si bien pratiquée- de se rééquilibrer, d’être en phase avec soi-même et le monde qui nous entoure.
Ne pensez qu’à la journée vécue et non au lendemain, ne procrastinez pas !
Après vous pouvez laisser cette journée s’éteindre à l’instar du soleil, en ne focalisant que sur la sagesse utile à votre vie. Laissez vous admirer la flamme et vous concentrer sur tous vos sens.
Vous pouvez mettre une musique adéquate (Hagall de Wardruna par exemple :p), allumer bougies et encens pendant cette séance.
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